Mercredi 12 août, 11h, quartier Sainte-Thérèse. Victoria, infirmière, et Anthony, travailleur social, entament leur maraude avec un visage familier : Bruno, 55 ans dont 20 passés dans la rue. Malvoyant, il vit sous un préau sommairement aménagé. Accrochés au-dessus de son lit, des posters de Messi et Ronaldo témoignent de sa passion pour le ballon rond. « Je ne rate aucun match à la radio », explique ce fan du Barça qui travaillait plus jeune dans le milieu équestre.
L’orage qui s’est abattu sur Nantes vient chasser la vague de chaleur, un soulagement pour Bruno. « Le soleil, c’est vraiment ce qu’il y a de plus dur. » Si l’hiver est particulièrement difficile pour les sans-abri, la saison estivale met également les corps à rude épreuve avec des risques de déshydratation et d’hyperthermie. « Nous adaptons nos horaires pour être présents aux heures les plus chaudes et nous distribuons beaucoup de bouteilles d’eau et de brumisateurs », précise Anthony. « Nous expliquons également comment repérer les signes précurseurs d’une déshydratation et nous rappelons les bons réflexes à avoir comme se mettre le plus possible à l’ombre », complète Victoria.
Après une course à la pharmacie pour chercher des médicaments et quelques échanges footballistiques, le binôme quitte le préau de Bruno. Ils reviendront le lendemain pour son anniversaire.
Un lien indispensable au cœur de l’été
« Bonjour, c’est le Samu social. Comment s’est passée la nuit avec l’orage ? » Sur les bords de l’Erdre, les maraudeurs distribuent des bouteilles d’eau et des kits de réduction des risques à des SDF vivant sous des tentes. Face à la crise sanitaire, ils sont aussi équipés en masques et en gel hydroalcoolique qu’ils fournissent en fonction des besoins.
Direction ensuite le Quartier de la création sur l’île de Nantes. Victoria et Anthony retrouvent Marc, 50 ans, en rupture familiale. Cet ancien professeur de musique a beaucoup voyagé avant d’arriver à Nantes il y a un an. Une bouteille d’eau, une couverture et une oreille attentive : le passage du Samu social lui permet « d’avoir un peu de conversation ». Un lien indispensable en période estivale, alors que la ville se vide et que les accueils de jour ferment leurs portes.
Piloté par le SIAO 44 (Service intégré de l’accueil et de l’orientation) et adhérent à la Fédération nationale des samu sociaux (FNSS), le Samu social de Nantes compte huit maraudeurs professionnels qui sillonnent 365 jours par an les rues de la ville. En 2019, les équipes ont rencontré 523 personnes, 79% d’hommes et 21% de femmes, aux profils variés : jeunes en rupture familiale, migrants, personnes en situation de grande exclusion avec de longs parcours de rue… Le Samu social les accompagne en respectant leur temporalité et le principe de libre adhésion. « L’idée, c’est vraiment d’être une première marche pour leur permettre d’accéder aux ressources de droit commun et sortir de la rue, précise Marie Dupas, cheffe de service au SIAO. Nous sommes une passerelle. »
La Ville de Nantes et une douzaine d’associations se mobilisent autour du dispositif Solidair’été – un accueil de jour temporaire ouvert rue Francisco-Ferrer. Jusqu’au 21 août, du lundi au vendredi, les usagers peuvent y prendre une collation et bénéficier de paniers-repas. Inauguré en février, l’espace Agnès-Varda reste également ouvert sur l’île de Nantes pour proposer un accueil de jour, un restaurant social et des bains douches.