« La France vit une crise du logement sans précédent, dont nous subissons les conséquences », déplore Pascal Pras, vice-président de Nantes Métropole chargé de l’habitat. Confrontée à une conjonction de facteurs (inflation, hausse des prix des matériaux, durcissement des conditions d’accès au prêt bancaire…), la construction est en berne. « En 2023, nous avons autorisé un peu moins de 4 000 logements neufs, très loin de l’objectif de construction de 6 000 logements neufs par an fixé par le programme local de l’habitat pour répondre aux besoins, explique l’élu. Cela provoque une tension très forte sur l’accès au logement, en particulier pour les ménages modestes et les classes moyennes. » Malgré une politique locale très volontariste, plus de 38 000 demandes de logement social sont en attente.
Des solutions au cas par cas
Pour relancer la machine, la Métropole nantaise a décidé d’agir à son niveau, et avec ses moyens. Un an après l’adoption, « à l’unanimité », de son plan de relance, le conseil métropolitain a dressé, jeudi 27 juin 2024, un premier bilan positif des mesures activées en partenariat étroit avec les communes, les promoteurs immobiliers, les coopératives d’habitat et les bailleurs sociaux. En quelques mois, vingt-six opérations, à l’arrêt faute d’un équilibre financier ou d’une pré-commercialisation suffisante, ont pu être débloquées. « Plus de 1 600 logements vont pouvoir sortir de terre, dont 542 logements sociaux, 301 locatifs abordables et 175 en accession abordable », se félicite l’élu.
Chaque projet gelé a été passé au crible pour analyser les freins et activer les bons leviers. La Métropole a notamment veillé à rendre le montage des opérations plus simples et flexibles. Aux Sorinières, par exemple, le programme Villa Clémence a pu être lancé en transformant 14 logements libres en 10 logements locatifs intermédiaires. « Cette offre – avec des loyers plafonnés au-dessous du prix du marché – est une bonne alternative pour les ménages qui ne sont pas éligibles au logement social », précise l’élu. Pour ouvrir l’accession à la propriété intermédiaire ou abordable au plus grand nombre, notamment aux classes moyennes, les plafonds de ressources ont également été révisés. Un ménage de 4 personnes qui gagne plus de 5200€ par mois peut désormais y prétendre. Pour une personne seule, le plafond est rehaussé à 2725 €.
20 millions d’euros pour le logement social
Autre mesure phare : l’enveloppe de 20 millions d’euros sur trois ans pour aider les bailleurs sociaux à construire de nouveaux logements sociaux. Cette aide exceptionnelle « s’ajoute aux 69,9 millions d’euros déjà budgétés pour la période 2021-2026 », précise Pascal Pras. Elle a par exemple bénéficié à la résidence autonomie pour personnes âgées Raffuneau, à Orvault, où la Ville a par ailleurs cédé le terrain pour un euro symbolique. Ou encore au projet Dahia sur l’île de Nantes, pour lequel la Métropole a activé différents leviers : une subvention de 520 000 euros, l’intégration de 10 logements sociaux abordables à la place de logements en accession, ainsi que des adaptations techniques permettant des économies (changement de menuiseries, travail sur les bardages métalliques, etc.)
« Il n’y a pas une solution miracle, souligne Pascal Pras, c’est l’addition de différentes mesures qui nous permettra de soutenir la production de logements. » La Métropole table en particulier sur le renforcement de sa politique d’acquisitions foncières. Lors du grand débat sur la fabrique de la ville, un investissement de 60 millions d’euros a ainsi été annoncé pour acheter des terrains dans les communes afin d’aider les bailleurs à développer les logements sociaux. Exemple ? À Vertou, l’opération Mélodie sort de terre sur un terrain de Nantes Métropole, cédé moins cher à la coopérative CIF, et avec un coup de pouce financier de la commune, pour construire 6 maisons en accession abordable.
Des bureaux transformés en logements
« Dans un un contexte de plus en plus contraint, nous avons besoin d’imagination et de souplesse pour permettre à chacun de se loger à un prix accessible, quels que soient sa situation ou ses besoins », assure François Prochasson, vice-président chargé du logement social. La Métropole développe notamment la construction industrielle et modulaire qui permet, grâce aux travaux réalisés en usine, de réduire les coûts de construction et l’empreinte carbone des projets. Elle étudie aussi la possibilité de réutiliser des bâtiments vacants, notamment des bureaux, pour y faire du logement. L’ancien Crédit Municipal de Nantes, propriété de la Ville, vient ainsi d’être confié à Nantes Métropole Habitat pour y réaliser 25 logements sociaux et abordable, en plein centre de Nantes.
Si l’action de la Métropole met avant tout l’accent sur le logement social et abordable, elle a aussi, mécaniquement, un effet levier sur la sortie de logements libres. « Ce plan donne de l’air au secteur de la construction et de la promotion immobilière, assure Pascal Pras. Les projets débloqués sont synonymes de carnets de commande qui vont pouvoir se remplir, et donc d’emplois préservés. »
De nouvelles mesures en faveur des classes moyennes et modestes
« Si ce premier bilan est encourageant, il reste encore beaucoup à faire », soulignent toutefois les élus. Pour tenter de relever le défi, de nouvelles mesures ont été présentées. Le « bail réel solidaire » (BRS) - qui permet à un ménage de devenir propriétaire des murs de de son logement sans supporter le coût du terrain, et donc de payer moins cher - va notamment être ouvert aux classes moyennes, avec la mise en place d’un « bail réel intermédiaire ». Un coup de pouce de 200 € par mètre carré sera par ailleurs offert à ceux qui veulent acheter un logement BRS dans les quartiers prioritaires (Bellevue, Nantes Nord, etc.), ce qui représente une économie de 13 000 euros en moyenne.
Volontariste, la Métropole rappelle toutefois que ce plan est « une mesure exceptionnelle ». « Il ne pourra pas pallier, dans la durée, les défaillances de l’État, pointe Pascal Pras. Il nous faut une vraie politique gouvernementale en faveur du logement social, répondant aux besoins des classes populaires et des classes moyennes qui sont les premières impactées par la crise actuelle. »
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