Des vaches en ville ? C’est ce qu’ont découvert les habitants du quartier Doulon-Gohards, vendredi 22 mai. Ce troupeau urbain, mis à disposition de Nantes Métropole Aménagement par l’Association de la vache nantaise, a du caractère. 100 % local, il est composé de cinq veaux et neuf vaches nantaises, une race locale rustique qui a bien failli disparaître. De 150 000 bovins après-guerre, cette race sélectionnée pendant des siècles par les paysans autour de Nantes pour son lait riche et la qualité de sa viande (au goût persillé), est tombée à moins de 30 bêtes dans les années 80.
"La race est très adaptée aux zones de marais et à leurs fourrages, mais l’arrivée du tracteur et le désintérêt pour les races mixtes (lait et viande) ont entraîné son déclin", explique Benoît Rolland, président de l’Association de la vache nantaise qui œuvre à sa réintroduction. La "Nantaise" - seule race locale en France dont le nom est attaché à une ville – est aujourd’hui sauvée. 1200 bêtes paissent de Plessé au Pays de Retz, avec déjà plusieurs troupeaux dans la métropole nantaise : à Coüeron, au Pellerin, Bouaye, Bouguenais et désormais à Nantes.
Les vaches remplacent les tondeuses
Les vaches de Doulon-Gohards ne sont pas là en villégiature ! Leur mission ? Entretenir les 10 hectares du Bois des Anses en attendant l’aménagement du quartier et l’installation des premières fermes. "L’écopâturage remplit une fonction à la fois agricole, écologique et sociale", souligne Benoît Rolland. Les animaux et leurs déjections sont favorables aux insectes et autres invertébrés, et par conséquent aux oiseaux qui s’en nourrissent. Sans carburant ni bruit de moteur, ils permettent un entretien naturel de ces zones bocagères.
Pour de nombreux citoyens, l’alimentation saine et locale est redevenue une priorité pendant la crise.
Benoît Rolland, président de l'Association de la vache nantaise.
Ce retour à des méthodes douces et non polluantes de gestion des réserves foncières prend tout son sens après le confinement. "Pour de nombreux citoyens, l’alimentation saine et locale est redevenue une priorité pendant la crise", observe l’association qui a lancé en 2015 le projet L’Etable nantaise pour réintroduire la race à Nantes et développer une filière de viande locale, en circuit court.
"Les restaurateurs et bouchers s’intéressent de plus en plus aux qualités de la viande nantaise, souligne Benoît Rolland. La demande excède l’offre. Notre objectif est d’aider de nouveaux éleveurs à s’installer pour atteindre 1500 vaches d’ici 2025." Marqueur de l’identité nantaise, ces vaches permettront aussi de créer de nouvelles relations avec les habitants, et notamment les jeunes générations éloignées du monde agricole. "Leur présence concrétise le retour de la nature en ville !"
Cette expérience d’écopâturage accompagne le retour des fermes sur Doulon-Gohards, projet d’aménagement atypique conjuguant urbanisme et agriculture (lire ci-dessous). Elle servira de test pour le projet de l’Etable nantaise. Soutenue par Nantes Métropole dans le cadre de son projet alimentaire territorial, le Département et la Région, l’association souhaite en effet développer le pâturage des animaux sur plusieurs sites naturels de l’Est nantais. Depuis le 22 mai, une trentaine de vaches et veaux entretiennent ainsi les 25 hectares de l’île aux hérons. Un autre troupeau pourrait également bientôt investir les Prairies de Mauves.
Micro-pousses, verger, maraîchage et cueillette
L’arrivée des vaches accompagne l’installation des premières fermes sur Doulon-Gohards. Retardés par la crise sanitaire, les travaux doivent démarrer en septembre 2020 pour réhabiliter les anciens corps de ferme de Saint-Médard, la Louëtrie et Bois des Anses et installer quatre exploitations engagées dans une culture de proximité, bio et ouverte sur le quartier du vieux Doulon :
- Sur Louëtrie 1, Gérald Cartaud cultivera des micros-pousses nantaises
- Sur Louëtrie 2, Clément Amour et Simon Prévost s’associent autour d’un maraîchage sur sol vivant, accompagné de propositions pédagogiques
- Sur la ferme du Bois des Anses, Laura Guillemot conjuguera maraîchage, petits fruits en auto-cueillette, verger, fabrication de cosmétiques et animations artistiques
- Sur la ferme de la Saint-Médard, Martin Lucas se lance également en maraîchage, mais développera aussi de la transformation avec un comptoir de vente.