Zohra, 56 ans, Saint-Mars-du-Désert
“Nous avons fait 28 heures, c’est la moitié du parcours. Personnellement, je trouve cela extrêmement intéressant, tout à fait dans mes attentes, on avance pas à pas, et la confiance est totale, ce qui est primordial pour pouvoir avancer.
Ce qui me pose souci, c’est le manque de temps. Il faut réfléchir vite aux questions que l’on travaille, et on a parfois tendance à s’éloigner du sujet. Même moi je me fais embarquer. Je pense que c’est normal, ça se fait étape par étape. Mais c’est vrai qu’en présentiel, les choses seraient différentes. Il n’y a pas d'apartés, de discussions qui se poursuivent après la session… Sur le fond, plus on avance dans la convention, plus on se rend compte de l’ampleur du travail, dans tous les domaines (éducation, consommation, travail…).
La question c’est quel genre d’humains on veut être. Il faut intégrer des modes de vie nouveaux qui chamboulent les familles, l'école, les entreprises. L’épidémie a exacerbé des situations présentes qui nous sautent à la figure. C’est peut-être le point positif : soyons réactif rapidement, sur ce qu’on ne veut plus voir et plus vivre. Pourquoi les inégalités persistent ? Est-ce que c’est inhérent au système ? Il faut se poser les questions, et réfléchir à ce qu’on met en place. Et pour ça, soyons moins dans la critique, plus dans la recherche de solutions concrètes.”
Arnould, 32 ans, Nantes
“C’est la première fois que je participe à une démarche de ce genre. C’est très différent de ce à quoi je m’attendais. Je pensais qu’on allait nous poser des questions, mais en fait ce sont des discussions, des débats, des avis originaux.
Je trouve que c’est facile de prendre la parole, les animateurs sont très attentifs. Et les participants écoutent. On ne se coupe pas la parole. Certains sont plus timides ou pensent que leur avis n’est pas important, mais tout le monde les aide à participer. Et on se rend compte que cette crise, tout le monde la vit différemment.
Le problème c’est que sur Zoom, quand c’est coupé, c’est coupé. On a parfois envie d’approfondir, mais on ne peut pas se recontacter ensuite. Je m’exprime beaucoup dans les petits groupes, mais quand on est tous les 80, j’ai tendance à plutôt écouter. J’étais dans un groupe vendredi soir avec des dames qui travaillent dans la collecte agricole. Elles m’ont parlé de choses intéressantes, ils essaient de changer la manière dont se pratique l’agriculture à Nantes. Ce sont des gens qui touchent vraiment ma vie. J’en ai même parlé à mon patron, puisque je travaille dans le maraîchage.”
Maï, 25 ans, Nantes
“Je me suis lancée dans la Convention parce que j’ai du temps, je cherche un emploi. J’avais aussi peur que les jeunes femmes, féministes et écolos ne soient pas assez représentées. J’aime beaucoup les moments en sous groupes, quand on discute tous ensemble, c’est très intéressant. Il y a parfois eu des gens qui tenaient des propos déplacés, mais en fait il y a quand même un consensus. C’est rassurant de voir des idées proches des miennes. Hier, on cherchait des points de débat entre nous, et on n’en trouvait pas. Une jeune fille a dit en rigolant que c’était parce que nous sommes tous des personnes sensées, c’est normal.
Je trouve aussi les moments avec les élus, les experts, très intéressants. J’ai été marquée par ce que disait François Dubet, le sociologue quand il a évoqué la méfiance et la défiance envers le gouvernement et les médias, et souligné qu’il y en avait aussi entre les gens. J’ai peur que la crise et la situation post covid exacerbe les tensions entre les gens.
La visio, c’est frustrant, mais on fait avec. Il vaut mieux ça que rien.Je me demande vraiment quelles seraient les différences si on s’était vus. Est-ce que la parole aurait été répartie de la même façon ? Peut-être que le temps de parole serait mieux partagé ? J’essaie de prendre la parole pour proposer aux autres de parler, organiser, équilibrer les temps de parole. Je ne veux pas prendre toute la place.”